Points de vue
Les InRocKs parlent du Trio Berg Jeanne Surmenian
Les plus beaux paysages, ceux de l’imaginaire
« Mûr pour la reconnaissance internationale. »
Un contrebassiste qui offre à chacun de ses chorus l’architecture savante d’un dynamisme communicatif. Un batteur qui semble avoir laissé au vestiaire le péché véniel de ses débuts dans la carrière (en l’occurrence un drumming trop dans l’air du temps d’un péremptoire binaire). Et un pianiste aussi mélodique que lyrique qui, manifestement, nourrit son inspiration autant d’Erroll Garner que de Jean-Sébastien Bach : avec ce deuxième tome de leurs aventures communes, Eric Surménian, Fred Jeanne et le patron du trio le Hollandais Edwing Berg semblent mûrs, malgré leurs jeunes âges, pour la reconnaissance internationale.
Règnent dans cet album l’équilibre et l’ouverture du trio, et la pondération d’un répertoire justement nuancé entre partitions originales (trois thèmes crédités au pianiste, un au batteur, et deux créations du contrebassiste) et visite de quelques pièces référencées : cette brigade internationale a en effet porté son dévolu sur trois thèmes de comédie musicale, appelant en particulier à la rescousse Jerome Kern et Rodgers & Hammerstein, la merveilleuse mélodie de « Con Alma », pont entre jazz et latinité signée Dizzy Gillespie, et une « Ma Dernière volonté » offerte en son temps à Serge Reggiani par Alice Dona.
La musique de velours du trio reste vivement influencée par les racines de Berg, et prend à chaque mesure une dimension aérienne, parfois presque primesautière, plus loin et rarement à l’acidité très pop, mais qui le plus souvent plonge l’auditeur dans une profonde mélancolie. La qualité expressionniste des onze morceaux – à telle enseigne qu’on éprouve à plusieurs reprises le sentiment d’une musique de film dont les images font défaut – évoque les plus beaux paysages, ceux de l’imaginaire. Et offre à une banale pompe à essence (cf. livret) tous les lyrismes du monde.
Distinction, raffinement, et musicalité intemporelle : Vol. II distille le double plaisir d’une petite heure de déambulation nostalgique, et de la découverte d’un talent encore méconnu dans l’Hexagone, mais qui s’empresse avec ce nouvel opus de rattraper le temps perdu.
Christian LARRÈDE
Chronique de Volume 2.